Le Théâtre de la Ville a lancé
sa Charte 18-XXI pour la jeunesse du XXIème siècle
au Théâtre de la Ville-Espace Cardin
et au Grand Amphithéâtre de la Sorbonne
les 13 et 18 avril 2019
18-XXI est né au Théâtre de la Ville, à Paris,
alors que les enfants nés à partir de 2000, commencent à fêter leurs 18 ans.
Chaque passage de siècle
ouvre une période de mutations,
troublée autant que féconde.
À l’origine de 18-XXI, il y a la prise de conscience d’un contexte global partagé :
la montée des nationalismes et des extrémismes,
l’urgence climatique, les enjeux migratoires.
Face aux tentations de repli, 18-XXI propose
de construire, de réinventer et de questionner,
par la force de l’art et de la culture:
un territoire commun, humain, tout simplement.
Pour accompagner le siècle qui naît et fédérer autour de la jeunesse.
Écrite par un ensemble d’artistes, de scientifiques et de philosophes,
la Charte 18-XXI définit des valeurs communes
à partir desquelles inventer des actions concrètes.
La Charte 18-XXI est un appel lancé aux artistes, aux chercheurs,
aux philosophes, aux institutions culturelles,
éducatives, scientifiques, universitaires.
C’est une invitation à imaginer et à réaliser des projets
avec et pour les générations du XXIe siècle.
18-XXI est un pont
entre l’art, les sciences, les langues et l’éducation.
Un pont entre des lieux, des villes, des pays.
Un pont entre le XXe siècle et le XXIe siècle.
Un pont entre des générations.
La charte 18-XXI cherche à rassembler
pour créer de nouveaux espaces de dialogue, d’échange et d’action.
1.POUR LA JEUNESSE DU XXIe SIÈCLE
18-XXI prend pour point de départ symbolique
l’entrée dans la majorité des premiers enfants du siècle, nés après 2000.
C’est une invitation à inventer des projets avec la jeunesse,
en dialogue avec les générations nées au XXe siècle.
2. UN THÉÂTRE-MONDE, LIEU DE L’HUMAIN
La Charte 18-XXI est née dans un théâtre, lieu de mémoire et de transmission.
Elle invite à faire résonner les langues, les imaginaires et les cultures de tous.
À faire entendre un langage universel, celui des arts et des sciences.
À réunir différentes générations autour de projets créateurs de passerelles
par-delà les frontières géographiques et culturelles.
18-XXI se fonde sur une conviction :
les possibilités de liens sociaux que la culture permet,
son pouvoir d’enrichissement et de transmission
par la rencontre de l’autre.
18-XXI ne réduit pas son champ d’action aux seuls théâtres:
tous les lieux culturels,
les structures scolaires et universitaires qui le souhaitent,
en France, en Europe et dans le monde, peuvent s’y associer.
3. UN APPEL EUROPÉEN
À l’heure où les nationalismes reprennent ici et là une vigueur funeste,
la Charte 18-XXI est portée par le désir de mettre en avant
une Europe de la jeunesse,
une Europe de la culture et des arts,
alternative aux approches économiques.
Une Europe qui n’existe pas sans ses relations multiples avec le monde,
fière de sa pluralité et riche de la diversité qui la constitue.
18-XXI cherche à repousser les dogmes et les frontières,
en associant la jeunesse de ce XXIe siècle,
première concernée par le futur de l’espace européen
que les fondateurs ont voulu pacifier.
Les projets 18-XXI font entendre d’autres histoires, d’autres visions
d’une Europe ouverte, libre, inventive, accueillante.
4. À L’ÉCOLE DU XXIe SIÈCLE
L’éducation constitue l’enjeu essentiel du XXIe siècle.
La curiosité, le désir d’explorer et de comprendre
doivent être partagés par tous, quel que soit leur âge.
La Charte 18-XXI vise à construire des passerelles
entre les nouvelles générations, les artistes et les enseignants
afin d’accompagner l’évolution de l’école et de l’université,
et d’accorder une place prioritaire
à l’éducation artistique, scientifique et culturelle.
Les projets 18-XXI en lien avec les écoles
s’attachent à développer le goût des enfants
pour les œuvres d’art, les connaissances scientifiques et la lecture ;
à éveiller leur curiosité et leur sens critique ;
à développer de nouveaux espaces d’expression de leurs imaginaires.
Les universités et les institutions d’éducation supérieure et de recherche
partenaires de 18-XXI
s’engagent à prêter attention et
à intégrer la pluralité des connaissances et expérimentations générées
par leurs propres étudiants au travers
de projets qui les encouragent à imaginer, entreprendre et créer.
5. CULTURE & ENVIRONNEMENT
Au cours du XXe siècle,
une prise de conscience des limites de notre planète a eu lieu.
Nous savons désormais que nous vivons dans un endroit fabuleux, la Terre,
dont nous devons préserver l’équilibre fragile et déjà profondément menacé.
La disparition de nombreuses espèces vivantes,
le réchauffement climatique et les catastrophes naturelles
sont déjà au cœur des préoccupations de certains chercheurs et artistes.
18-XXI vise à intégrer ces enjeux majeurs du XXIe siècle dans ses projets.
6. CURIOSITÉ & EXPÉRIMENTATION
L’expérimentation, la curiosité, la capacité de se tromper et de recommencer
sont des moyens nécessaires pour appréhender et comprendre le réel.
Le discours et la méthode scientifiques
sont nécessaires pour construire ce XXIe siècle.
18-XXI propose de mettre en lien les pratiques scientifiques et artistiques.
En 2015, l’astrophysicien Stephen Hawking adresse ses vœux à l’humanité : « Par le biais de la physique, j’ai cherché à répondre aux plus grandes questions.
Mais il y a d’autres défis, d’autres grandes questions qui attendent des réponses
et pour cela nous avons besoin d’une nouvelle génération curieuse, engagée,
et qui comprend la science [...]
Nous sommes tous des voyageurs dans le temps,
nous avançons ensemble vers le futur.
Mais il faut travailler ensemble à faire du futur un lieu
que nous avons envie de visiter. [...]
Je suis bien conscient de la valeur précieuse du temps.
Saisissez le moment. Agissez maintenant. »
La Charte 18-XXI entre en résonance avec ce message.
7. D’UN SIÈCLE À L’AUTRE : HÉRITAGE & TRANSMISSION
Le XXe siècle a connu deux guerres mondiales,
des guerres de libération du joug colonial,
et des horreurs sans nom, jusqu’à celle de la Shoah.
Mais il a connu aussi des réussites et réalisé des œuvres inouïes :
dans le domaine de la technique,
pour améliorer les conditions de vie humaine,
dans le domaine de la science,
pour accroître nos connaissances de l’univers, de nos environnements
et de nous-même et, bien sûr aussi
dans le domaine des arts.
18-XXI naît du désir de rassembler les générations
pour faire ensemble un bilan du siècle passé.
Il a pour principes fondateurs la mémoire, la transmission
et la connaissance de l’histoire individuelle et collective.
8. DEVENIR UN AMBASSADEUR DE LA CHARTE 18-XXI
Chaque lieu partenaire, chaque individu
inspiré par les principes de cette charte,
peut en devenir un ambassadeur,
qu’il soit artiste, scientifique, écrivain, avocat, sportif...
Jeune ou âgé... Être un ambassadeur 18-XXI,
c’est porter symboliquement les principes de la Charte
et agir concrètement en son nom.
Ainsi, se développe un réseau ouvert et évolutif
pour imaginer et expérimenter ensemble des projets artistiques,
créer des espaces de dialogue, de débat et d’échange.
Chaque partenaire peut librement être à l’origine
d’une action et accompagner sa réalisation.
9. PROJETS 18-XXI
La Charte 18-XXI est un texte fondateur
dont les principes doivent être concrétisés dans des actions.
Un projet 18-XXI peut se définir par sa dimension créative,
par la participation de jeunes nés après 2000
et par les passerelles qu’il crée entre des générations,
des disciplines, des lieux et des langues.
Une action 18-XXI doit être portée par la fantaisie,
la poésie, la joie et l’imagination.
Elle cultive un esprit de curiosité, d’ouverture et de bienveillance.
10. PASSÉ/PRÉSENT/FUTUR
18-XXI fait résonner le passé, le présent et l’avenir :
chaque projet devra garder la mémoire
de son processus de recherche et de création.
Ces traces documentaires sont aussi essentielles que les événements publics.
Ils sont une invitation à imaginer d’autres projets à venir.
11. OUVRIR UN ESPACE DE DIALOGUE
La Charte 18-XXI ouvre un espace de dialogue avec la jeunesse du XXIe siècle,
ses désirs, ses révoltes, ses questionnements, ses rêves et ses initiatives.
Chaque élément de cette charte est une proposition
qui peut être complétée, amendée, modifiée.
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Le seuil du millénaire
Extrait d’un texte de Danièle Léon de Juillet 2020
Responsable artistique de l’Atelier du Verbe Paris14
« L’année 2019 nous avait introduits à des événements uniques en leur genre, avec le mouvement des gilets jaunes, les manifestations de lycéens, la multiplication des actions citoyennes pour constituer des listes municipales indépendantes des partis politiques. Aussi originaux dans leur diversité, ces mouvements témoignaient de prises de conscience inédites dans la manière d’inventer des modes d’expression émanant directement des citoyens. D’autres événements mondiaux dans la même période avaient en commun la remise en question des gouvernances autoritaires, asservis aux lobbies financiers, incapables de prendre les mesures adéquates face au dérèglement climatique et l’aggravation des inégalités sociales.
L’année 2020, avec cette apparition de la pandémie, a provoqué à son tour du jour au lendemain un arrêt général de toute la vie économique mondiale dans une étrange continuité avec ces révoltes contre l’ordre établi de 2019. Les mesures de confinement ont de fait éteint dans l’œuf les initiatives qui se préparaient dans ces nouveaux foyers de résistance. Mais après une première période de sidération, les appels à la mobilisation pour « empêcher tout retour à l’Anormal » se sont multipliés.
L’un des intervenants du colloque organisé par Télérama à l’Espace Cardin entre le 15 et le 19 juin 2020 (Emmanuel Demarcy-Motta, Directeur du théâtre de la ville) insistait pour dire que cette crise, unique en son genre, est la marque du passage d’un siècle à l’autre, qui nous montre jusqu’où il faut aller pour que ce passage soit effectif, ce qui n’était pas le cas durant les vingt premières années. Il s’agit, dit-il, de faire un pont entre les deux siècles sur lequel d’autres pourront passer et c’est la jeunesse qui nous montre la voie car c’est elle qui est la plus proche, en arrivant sur terre, de la dynamique de l’actualité du changement.
Charles Péguy, parmi d’autres auteurs, avait aussi prévenu dans les dernières années du 19e siècle, du changement total qui allait s’opérer au vingtième, qui serait soumis à la puissance tyrannique de l’argent et de la technique.
Ce qui caractérise l’appellation de « vie moderne » a été justement inauguré au vingtième siècle. Et pour décrire le pont dont parle E. Demarcy-Motta, il faut d’abord se demander : depuis quand notre vie quotidienne s’est mise à changer du tout au tout ? Et nous savons d’emblée que le premier changement fondamental est lié à nos modes de locomotion. Ce qui d’emblée change notre rapport avec le temps d’une journée, celui des mouvements de notre corps, celui de nos activités de perception, de notre façon de rencontrer ce qui est autour de nous. Et toutes les productions de la technique, accompagnées de la notion de rentabilité à tout prix, ont le même effet accélérateur. Le pas qui a été franchi ensuite dans les dernières décennies du 20eme siècle est celui de l’informatique puis celle du téléphone portable qui à tout instant peut nous mettre dans la seconde en communication avec l’autre bout du monde... »